Avis de tempête sur les baleines au large des côtes béninoises
Notre collaborateur Thierry De Coster a eu le plaisir de passer dans l’émission de La Première « Au bout du jour », accompagné de Gauthier Amoussou, Responsable de l’ONG Eco-Bénin. Un entretien réalisé par le journaliste Eddy Caekelberghs sur la protection des baleines et plus largement des éco-systèmes côtiers.
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La réunion de Florianapolis
Du 10 au 14 septembre 2018, la réunion annuelle de la Commission baleinière Internationale (CBI) s’est déroulée à Florianopolis au Brésil. La proposition de la création d’un Sanctuaire Baleinier en Atlantique Sud (SBAS) a été mise sur la table par le Brésil et d’autres pays partenaires (Argentine, Gabon, Uruguay et Afrique du Sud). Ce sanctuaire «répondrait à diverses menaces auxquelles le 21ème siècle expose les baleines, notamment les collisions avec les navires, le bruit sous-marin, les changements climatiques et les emmêlements (…) il s’agissait d’une occasion de montrer au monde l’esprit de coopération de la CBI en matière de conservation des baleines ». Plus d’informations : voir le compte-rendu de la 67ème réunion de la CBI ici
Cette proposition a été soutenue par les États-Unis, l’Union européenne (via l’Autriche), le Mexique, Monaco, la Nouvelle-Zélande, l’Inde, le Gabon, la Colombie, le Pérou et l’Argentine. Mais la proposition a été refusée par le Japon, l’Islande, la Norvège, la Russie, et, de manière surprenante, par des pays comme le Bénin, le Sénégal, la Guinée, le Togo, le Libéria, le Cambodge et Antigua-et-Barbuda.
La nouvelle position de certains pays, dont le Bénin, est très interpellante. Depuis quelques années, les autorités béninoises, avec le soutien de la société civile, ont investi environ 150 millions d’euros dans l’éco-tourisme et la protection des baleines. Le Golfe du Bénin est un lieu privilégié d’observation de cet animal qui vient se reproduire dans ses eaux chaque année d’août à novembre. La décision de ne pas soutenir un sanctuaire baleinier paraît dès lors à contre-courant d’une politique de préservation de la biodiversité. De plus, chose encore plus étonnante, les autorités béninoises (tout comme les représentants du Sénégal et du Togo) sont arrivées à Florianopolis avec l’intention de soutenir le projet de création du sanctuaire. Néanmoins, selon Gauthier Amoussou, une rencontre s’est tenue la veille du vote entre les autorités de ces pays et la délégation japonaise. Les autorités nipponnes auraient donc fait pression sur le Bénin afin de bloquer le processus de création de sanctuaires baleiniers.
Le Japon quitte la CBI
Les discussions menées fin septembre et d’autres ruptures dans le processus de dialogue entre les divers partis de la CBI ont conduit le Japon à quitter la Commission le 26 décembre dernier. Ce départ implique également un retour à la pêche commerciale de la part du Japon dès juillet prochain. Pourtant, le départ du Japon de la CBI n’est pas forcément une mauvaise nouvelle :
« L’objectif de Sea Shepherd de mettre un terme à la chasse dans le sanctuaire baleinier antarctique a été atteint. C’est une victoire dans notre combat pour stopper la chasse à la baleine dans l’océan Austral. Si le Japon se retire de la Commission Baleinière Internationale (CBI), cela permet à cette dernière de voter la motion pour établir un sanctuaire dans l’Atlantique Sud, mettant donc un terme effectif à la chasse dans tout l’hémisphère Sud. Le Japon va donc rejoindre la Norvège et l’Islande dans le groupe des nations baleinières pirates et hors la loi dans le Pacifique Nord et l’Atlantique Nord. La guerre des baleines dans l’océan Austral est bientôt terminée et nous allons pouvoir concentrer notre attention sur l’hémisphère Nord. Sea Shepherd accueille favorablement cette annonce du Japon et y voit un développement positif ».
Sea Shepherd : pourquoi le retrait du Japon de la CBI est une bonne nouvelle pour les baleines
Pourquoi ULB-Coopération se soucie de l’actualité de la CBI ?
La préservation de ce géant des mers est un enjeu très important. Sans contrôle de son exploitation commerciale, des abus se répandent, et ceux-ci déséquilibrent les écosystèmes, avec des conséquences en cascade dépassant à terme le seul domaine biologique/écologique. Les secteurs économiques et migratoires, notamment, figurent en bonne place parmi les impacts secondaires néfastes d’une surexploitation de la baleine.
L’implication d’ULB-Coopération dépasse ceprendant cet enjeu important. En février 2018, ULB-Coopération a formé, avec 8 autres acteurs, le collectif des deltas du Golfe du Bénin. Avec l’aide de diverses ONG locales, dont Eco-Bénin (citée ci-dessus), le collectif entend œuvrer collectivement pour la conservation des ressources marines et côtières de zones de deltas du Golfe du Bénin (la charte de fondation du collectif des deltas du Golfe du Bénin est à lire ici).
L’objectif de la création d’une telle structure est d’influencer les politiques pour une mise en œuvre efficace des conventions relatives à l’environnement notamment aux ressources marines et côtières dans le Golfe du Bénin. Une note conceptuelle de projet de plaidoyer politique pour la protection des ressources marines et côtières souligne l’importance de la préservation de celles-ci :
« Les habitats marins et côtiers de l’Afrique de l’Ouest abritent une abondance de ressources naturelles, qui fournissent des services écosystémiques vitaux et contribuent à atténuer les effets néfastes des changements climatiques. Ils sont caractérisés par des habitats uniques comme les mangroves, des estuaires et de nombreuses zones d’upwelling ainsi que des espèces emblématiques comme le lamantin, des colonies d’espèces d’oiseaux migrateurs, les tortues marines, et des mammifères marins. Ils jouent également un rôle central dans la résilience économique et physique des régions côtières face aux défis socioéconomiques et environnementaux actuels et futurs. »
Toutefois, la problématique est plus complexe, et le dossier est amené à encore évoluer.
Une affaire à suivre donc…