Des greniers de conservation adaptés pour les exploitations familiales au Sénégal
ULB-Coopération, ONG universitaire, favorise et accompagne ses partenaires du Sud dans la recherche, le développement et la vulgarisation d’initiatives innovantes, afin de répondre aux attentes et aux besoins des populations vulnérables.
En Afrique de l’Ouest, de plus en plus d’agriculteurs et agricultrices prennent conscience de l’intérêt de conserver, multiplier et sélectionner leurs variétés de semences traditionnelles locales. C’est une réaction face aux semences « améliorées », hybrides, génétiquement modifiées, largement répandues mais réduisant l’autonomie des paysans (semences non-reproductibles).
Notre partenaire sénégalais, Am be Koun – Solidarité (ABK-S), localisé dans la région de Tambacounda, s’est lancé un défi en 2018 : construire un prototype de grenier amélioré permettant de stocker adéquatement des semences. Jusqu’alors, les greniers existants étaient la cible de rafles par divers animaux, et n’offraient pas les conditions de conservation adéquates, abîmant ainsi les semences. Cette action était inscrite dans le cadre du projet PADAV (Projet d’Appui à la Promotion de l’Agroforesterie Villageoise), grâce à une subvention de l’Agence Wallonne de l’Air et du Climat (AWAC). Dans ce projet, ABK-S accompagne des exploitations familiales pour le développement de systèmes de production agroécologique durables et innovants, résilients face aux effets des changements climatiques tout en capitalisant les échanges croisés d’expériences et d’expertises.
Les analyses menées ont démontré les importantes quantités de récoltes perdues dues aux difficultés de préservation des semences, liées aux mauvaises conditions ou à la quasi-inexistence de moyens adéquats et de techniques efficaces de conservation. La volonté des bénéficiaires de revaloriser les techniques traditionnelles de conservation et de préservation des récoltes et des semences a également émergé.
Une étude a été conduite par ABK-S auprès d’exploitations familiales pour identifier leurs techniques de conservation actuelles afin de les améliorer ou de proposer des alternatives, notamment des modèles de greniers adaptés, transposés de pratiques ancestrales aujourd’hui abandonnées. Une revue de la littérature a montré que les « cases de semence » qui existaient jadis dans les villages avaient chacune leur spécificité (en termes d’histoire et d’organisation) et étaient adaptées à chaque terroir (matériaux locaux, forme propre à chaque région).
Les séances d’échanges ont suscité des débats enrichissants entre les populations qui ont conclu que l’abandon des pratiques ancestrales avait hélas été destructeur pour leur sécurité alimentaire et nutritionnelle.
Les caractéristiques techniques du grenier ont été revues, validées par les agriculteurs·trices, et privilégient au maximum les matériaux disponibles dans la zone d’intervention tout en satisfaisant aux normes anti-incendie. Le grenier peut contenir plusieurs types de semences (mil, maïs et arachide) disposées en étages. Ces semences sont physiquement protégées des différents facteurs d’altération (rongeurs, humidité, vent, bétail), protection également renforcée par l’utilisation de plantes locales répulsives.
Les greniers, par la conservation des semences, permettent donc le maintien d’un capital semencier paysan. Ils revalorisent également des techniques ancestrales, particulièrement adaptées et efficaces à l’environnement dans lequel elles s’intègrent.
Les paysannes et paysans ayant participé au projet ont démontré un engouement et un engagement clairs. Il s’agit maintenant de soutenir la diffusion du « prototype » pour contribuer à la sécurité alimentaire d’un plus grand nombre de familles.